Xénophane de Colophon
Xénophane était fils d'un certain Dexios et originaire de la ville de Colophon, en Ionie. C'est dans cette cité que sont nés, un peu avant lui, les poètes Polymneste et Mimnerme, et l’on disait aussi qu’Homère y avait vu le jour. La date de naissance de Xénophane n’est pas établie avec certitude. Des témoignages affirment qu’il serait né pendant la cinquantième Olympiade (580-576 av. J.-C.), ou même pendant la quarantième (620-617 av. J.-C.), mais ces dates ne s’accordent pas avec les écrits d’autres doxographes qui soutiennent notamment que Xénophane aurait, à la fin de sa vie, vécu à la cour de Hiéron de Syracuse, dont le règne s’étend de 476 à 467. Dans l’un de ses poèmes (fr. 8, v. 3), il dit lui-même avoir quitté sa cité natale à l’âge de vingt-cinq, probablement « quand le Mède est venu » (fr. 22, v. 5), c’est-à-dire au moment de la conquête de l’Ionie et de la prise de Colophon par le Mède Harpage, vers 545 av. J.-C. Il serait donc né, vraisemblablement aux alentours de 570 av. J.-C. La date de sa mort est elle aussi incertaine. Les doxographes s’accordent cependant sur la longévité exceptionnelle de Xénophane, et lui-même nous en donne un témoignage dans le fragment 8 (v. 1-2), où il affirme que soixante-sept ans se sont écoulés depuis son départ de Colophon : il a donc quatre-vingt-douze ans au moment où il écrit. Les fragments et témoignages qui nous sont parvenus tendent en effet à montrer qu’il serait né assez tôt pour connaître Anaximandre et Thalès, dont il aurait critiqué les théories si l’on en croit Diogène Laërce, et qu’il aurait vécu assez vieux pour être contemporain d’Héraclite (qui cite Xénophane dans son fr. 40, voir ci-dessus), côtoyer Épicharme et Simonide à la cour de Hiéron, et peut-être même répondre aux propos d’Empédocl3. Xénophane a donc pu vivre jusque 475 av. J.-C. environ. Chassé de sa patrie par les Mèdes, il semble qu’il ait mené une vie de voyages à travers la Grèce, allant « de cité en cité », comme il le dit dans les fragments 8 et 45. Quelques témoignages succincts laissent imaginer que ses errances l’auraient mené dans les îles de Paros, Malte et Lipari. Selon Diogène, Xénophane aurait, enfin, gagné la Sicile, séjourné à Zancle (Messine), puis à Catane, avant de s’installer à Syracuse, à la cour de Hiéron, vraisemblablement à la fin de sa vie. D’après Diogène (9, 20), enfin, il aurait aussi pris part à la colonisation de la cité d’Élée en Grande Grèce. Une anecdote, rapportée par Aristote, le montre d’ailleurs conseillant les habitants de cette cité à propos d’un culte qu’ils voulaient instituer.
Ses voyages l’ont conduit à rencontrer certains grands penseurs et poètes de son temps, rencontres dont nous trouvons la trace dans les vers qui nous restent. C’est sans doute au cours de ses voyages en Grande Grèce que le poète a dû entendre parler de la communauté. À la cour de Hiéron, sans doute a-t-il rencontré le poète Simonide, dont il se moque dans ses fragments ; il a sûrement côtoyé également Épicharme, poète comique et philosophe, qui aurait écrit à son propos. Enfin, la tradition veut que Xénophane, à Élée, ait rencontré Parménide, et que celui-ci ait été son élève, mais peut-être ne s’agit-il que d’une légende.